Financement de la santé en France : Fin de l’état providence ou responsabilisation des assurés sociaux ?
Compte rendu de la conférence du 5 octobre 2011
intitulée
Financement de la santé en France : Fin de l’état providence ou responsabilisation des assurés sociaux ?
par
le Docteur Jean-Claude VOGT
Chirurgien orthopédiste
Syndicaliste médical
La conférence du Docteur Vogt s’est articulée autour de deux grandes parties : un diagnostic chiffré et l’étude des mesures pour combler les déficits.
Le diagnostic en chiffres
Dépenses courantes de santé: 234 100 Milliards d’euros (M€)
Coût de gestion du système de santé : 15 900 M€
Indemnités journalières : 12 500 M€
Soins aux personnes âgées en établissements : 7 700M€
Recherche : 7 600 M€
Prévention : 5 900 M€
Consommation de soins et de biens médicaux : 175 000 M€ : 9% PIB :
2 698 € par habitant par an / 254 € reste à charge des ménages : 9,4%, qui peut partiellement être pris en charge par les Mutuelles
Consommation de soins et biens médicaux
Hôpital public : 61 800 M€
Hospitalisation privée : 19 500 M€
Soins de ville : 44 000 M€
Médicaments : 34 400 M€ : 525€/ habitant
Transport des malades : 3 400 M€
Parallèlement, l’espérance de vie continue à s’accroître, l’augmentation est en moyenne de 1 an tous les 5 ans.
Des études ont également montré que les dépenses de santé augmentent avec l’âge de la population, c’est une tendance qui se retrouve dans de nombreux pays.
L’étude des mesures de réduction des déficits
On observe un noyau dur de dépenses qui augmentent. Elles concernent les affections de longue durée et les dépenses de fin de vie. Il est difficile d’y toucher. Si des économies peuvent être réalisées, c’est à la marge : sur les transports et avec des ordonnances bi-zones.
Une action sur les soins courants a été développée. Des recommandations sur le bon usage des soins et sur les allers-retours entre les professionnels de santé ont été mises en place. Le parcours de soins fonctionne ; il est plus ou moins respecté. Quant au dossier médical personnel, il devrait se développer, mais un patient pourra toujours refuser des inscriptions sur la puce.
Différentes pistes peuvent être développées pour réduire les dépenses de médicaments : la diffusion des génériques doit être poursuivie en veillant toutefois à la qualité des produits et aux difficultés de prises que peuvent rencontrer certains patients. De gros efforts restent à faire pour convaincre les patients que les antibiotiques ne sont pas adaptés à toutes les pathologies. A ce niveau, il faut également continuer à sensibiliser les médecins généralistes. Et bien entendu, le contrôle du prix des médicaments reste un outil à développer. Enfin, régulièrement, des mesures sont prises visant au déremboursement de certains médicaments dont l’efficacité est remise en question et qui relèvent davantage du confort du patient.
La piste prioritaire dans ce domaine, c’est bien la prévention par un mode de vie sain et équilibré.
En ce qui concerne la chirurgie ambulatoire, le Docteur Vogt souligne que la démarche permet non seulement la réduction des coûts, mais également un meilleur suivi des actes chirurgicaux et moins de complications. La médecine privée est pionnière dans ce domaine et a conduit à de nombreux progrès dans le domaine des techniques chirurgicales et d’anesthésie. Bientôt, il faudra obtenir une dérogation pour réaliser certains actes chirurgicaux en hospitalisation et non en ambulatoire.
Pour réduire les frais d’hospitalisation, des mesures de réorganisation et de regroupement des hôpitaux ont déjà été prises et doivent être poursuivies. Contrairement à une idée couramment répandue, proximité ne rime pas avec sécurité. Attention aux hôpitaux qui ont une activité inexistante ou trop faible ! Un hôpital est parfois le plus gros employeur dans un bassin d’emploi ce qui peut poser un problème politique lorsqu’on veut le fermer. Mais dans ce domaine, il faut bien distinguer l’intérêt économique et la sécurité des patients. Il est évident qu’il convient également d’encourager la certification des établissements et l’accréditation des médecins.
Concernant le coût des frais d’hospitalisation, le Docteur Vogt souligne que de manière générale, le service public coûte de 30 à 40 % plus cher que le privé. Il faut une convergence plus rapide entre les secteurs privés et publics. Initialement prévue pour 2012, elle a été reportée à 2018 et un nouveau report à d’ores et déjà été demandé.
Se pose également la question de la participation aux frais d’hospitalisation et de transport par véhicules sanitaires. Certaines catégories de patients ne paient strictement rien pour ces frais alors qu’ils auraient les moyens financiers de le faire, et les conditions physiques pour se déplacer avec leur propre véhicule.
De gros effort doivent être effectués pour responsabiliser les patients. Ils doivent apprendre à faire confiance à leur médecin pour les soins, pour les séjours en établissements et pour les médicaments, à réaliser eux-mêmes les trajets sanitaires si par ailleurs ils se déplacent de manière autonome.
De nouvelles assurances pourraient être développées, notamment en ce qui concerne des sports à risque ou l’usage d’outils à risque. Enfin, d’autres questions devront être débattues: la question des dépassements d’honoraires est traitée de façon polémique et non pragmatique alors que la priorité est la revalorisation du paiement de certains actes médicaux et que la plainte principale des usagers porte sur le reste à charge concernant les frais d’optique et de soins dentaires.
Pour conclure, le Docteur Vogt a rappelé les points-clés suivants :
Les déficits sont importants.
La solidarité nationale est indispensable pour les risques importants de la vie.
Le financement de la santé repose sur les revenus du travail.
Le système de financement élaboré pendant des années fastes s’essouffle.
Des ajustements sont nécessaires ainsi qu’une participation citoyenne.
Anne SANDER, Secrétaire Départementale Adjointe en charge de la Réflexion et des Débats