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Compte-rendu de la conférence-débat sur les  » salles de shoot  » avec le Dr BARATTA et Pascal MANGIN

 

Compte-rendu de la conférence-débat  du jeudi 20.06.2013 à Strasbourg

portant sur les  » salles de shoot  »

animée par

Alexandre BARATTA, Psychiatre, Praticien hospitalier à l’UMD de Sarreguemines

Pascal MANGIN, Conseiller municipal de Strasbourg,

Président de la Commission Culture, Identité régionale, Bilinguisme au Conseil régional d’Alsace

Débat BARRATA-MANGIN 20-06-13

Pascal Mangin introduit le débat en s’interrogeant : les salles de shoot doivent-elles vraiment être une priorité du Gouvernement à l’heure actuelle ?

 

En effet, de nombreux sujets sociétaux sont mis sur la table, mais sont-ils vraiment urgents ? Ne permettent-ils pas simplement de détourner l’attention des français, des vraies difficultés ?

 

On récence 390 décès liés à des overdoses par an en France. C’est évidemment de trop, mais comparé aux décès liés à l’alcool ou à la route, le nombre est plutôt faible.

 

Il serait plus judicieux de s’intéresser à des phénomènes aux conséquences dramatiques et qui se développent de manière préoccupante : la consommation de cannabis (1 adolescent sur 4 en a déjà consommé), l’apparition de nouvelles drogues aux effets désastreux … Et surtout, il faudrait mettre en place de véritables politiques publiques de prévention !

 

Pascal Mangin estime que les pouvoirs publics sont complètement incohérents en autorisant l’ouverture de salles de shoot. Le Gouvernement ne peut pas proposer et faire voter des lois par les parlementaires, interdisant l’achat et la consommation de drogues et par ailleurs, autoriser la consommation dans des espaces protégés. L’apparition de salles de shoot suppose aussi la mise en place de zones de non droit car autour des salles de shoot, il faudra accepter le trafic de drogues, sauf si l’Etat fournit lui-même la drogue, ce qui n’est pas prévu.

 

Le coût d’une salle de shoot n’est pas neutre pour la collectivité. On estime le coût à un million d’euros, probablement pris en charge par l’Etat et par les collectivités locales.

 

L’autorisation des salles de shoot questionne aussi sur le rôle du médecin : soigner des malades ou assister des personnes qui se détruisent ?

 

L’implantation des salles de shoot est prévue dans des quartiers plutôt populaires : dans le 10ème arrondissement à Paris, dans le quartier de la Gare à Strasbourg. Cette démarche amplifiera un phénomène de ghettorisation. Aujourd’hui, conclut Pascal Mangin, Strasbourg n’a aucune raison de se porter candidate à l’ouverture d’une salle de shoot.

 

 

Le Docteur Baratta explique que le concept de salles de shoot va à contre courant de tout ce qui a été fait ces dernières années pour la prévention et la prise en charge des personnes droguées.

 

Il nous rappelle d’abord que depuis une dizaine d’années, on n’oppose plus les drogues dures aux drogues douces. Toutes les substances sont considérées comme des drogues dures !

L’héroïne est sans aucun doute la drogue la plus dangereuse car il suffit d’en consommer une fois pour créer une dépendance physique et psychologique, de même que des lésions à vie. Le sevrage est particulièrement difficile à supporter, avec des effets tels que des nausées … très lourds.

 

Différents traitements substitutifs aux opiacés existent et fonctionnent plus ou moins bien.

 

Le premier traitement est le Subutex. Le problème avec ce produit vient du fait qu’il est souvent détourné. Certains patients s’en procurent en faisant le tour des médecins et le revendent après. Il est parfois aussi mal utilisé.

Le second traitement est la méthadone. Elle peut provoquer des overdoses si elle est mal utilisée.

Le risque avec les traitements substitutifs, c’est qu’ils deviennent très dangereux s’ils sont mélangés à de l’alcool.

Enfin, le médicament le plus récent est suboxone.

 

Bien qu’il faille rester très prudent et conscient des limites des traitements de substitution, des études montrent néanmoins que si les détenus suivent un traitement de substitution, ils sont moins souvent incarcérés. On observe donc une baisse de la criminalité.

 

Les chiffres indiquent qu’il y aurait entre 500 000 et 700 000 consommateurs d’héroïne en France. Le chiffre d’affaire généré par cette drogue est de 60 millions d’euros !

 

Le Docteur Baratta a de nombreux contacts avec nos voisins allemands et connaît bien la situation de Sarrebruck ou se trouve une salle de shoot. Les quartiers autour de cette salle sont devenus une véritable zone de non droit, livrée à la mafia russe. La prostitution s’est développée, de même que la criminalité en général. Devant ce constat, l’Etat allemand en vient à vouloir réduire le financement des salles de shoot.

 

A Sarrebruck, les drogués qui se rendent dans la salle de shoot forment plutôt une population d’un certain âge. Mais, phénomène nouveau, on voit de plus en plus arriver des jeunes qui passent du statut de  » sniffeur  » à celui  » d’injecteur « , avec les conséquences que ça suppose.

 

 

Le projet d’installation de salle de shoot à Strasbourg semble déjà bien avancé. Il faudra une mobilisation très forte de la population du quartier Gare qui doit l’accueillir, pour imaginer l’arrêter.

 

La question du financement reste entière : qui paiera ? La question est d’autant plus pertinente que parallèlement, des centres de soins pour toxicomanes vont fermer, celui de Metz par exemple.

Anne SANDER, Secrétaire Départementale Adjointe en charge de la Réflexion et des Débats

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