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La culture : une dynamique au cœur de la politique, par Robert GROSSMANN

rg malraux médiathèqueSi le mot culture, utilisé jusqu’à l’usure, doit avoir un sens, à quelques jours d’un scrutin, c’est bien celui d’être une dynamique qui s’installe au cœur de la politique pour l’inspirer de manière magistrale et permanente.
Agir en politique avec une vision culturelle. Donner du sens à l’action, voilà le mot d’ordre.
La région doit être culturelle avant tout. Son projet doit être culturel.
A quoi servirait une politique forte en matière d’économie, de transport, à plus forte raison en matière d’apprentissage ou de lycées si sa finalité n’était l’élévation de l’homme vers le plus haut degré de sagesse possible.
L’engagement écologique enfin ne saurait être et n’est rien d’autre que culturel. Voyons ! : « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » Rabelais n’est-il pas d’une totale actualité et éminemment écologique ?

Démocratiser la culture

Paraphrasons le décret célèbre de juillet 1959 : « Les élus ont pour mission de rendre accessible les œuvres capitales de l’humanité au plus grand nombre possible; d’assurer la plus grande audience possible à notre patrimoine et de favoriser la création des œuvres de l’esprit… »
C’est la mission que Malraux s’était assignée, au niveau de l’Etat, et cela autorise à proclamer que, certes la culture peut être élitaire, mais que la mission des élus en République est de la démocratiser. Et pourquoi donc si ce n’est pour enrichir intellectuellement, spirituellement, moralement le plus grand nombre possible de nos concitoyens, pour les élever, leur donner l’envie et les moyens d’accéder à plus de savoir.
La fréquentation des œuvres provoque cet étonnement, cette surprise et instille finalement ce désir de savoir qui mène à la sagesse.
Il est nécessaire de doter nos concitoyens de tous les moyens qui favorisent l’accès à la culture et l’école est bien évidemment un vecteur fondamental.

Genius loci

En Alsace les responsables politiques ont plus qu’ailleurs l’impérieuse obligation de développer la culture à travers toute leur action. C’est pour eux une ardente obligation…car il y a un génie du lieu en cette terre d’Alsace qui recèle en elle les plus belles leçons d’humanisme à travers les figures tutélaires de Maître Eckart, Herrade de Landsberg, Schongauer, Sebastien Brand, Beatus Rhenanus et tous leurs pairs. Elle recèle aussi les leçons des plus grands drames de l’histoire dont l’horreur doit à tout jamais rendre présente la volonté de tolérance, d’acceptation de l’altérité, d’ouverture à l’autre.
Méditer devant le Retable d’Issenheim, l’ossuaire de Dambach qui, réalité ou légende, rappelle la guerre des paysans et les invasions, lire Goethe aussi bien que Chateaubriand ou Camus, se laisser saisir par une dramaturgie, rencontrer soudain Brahms ou Tchaïkovski, être interpellé dans les salons Hans Arp de l’Aubette, voilà ce que la Région Alsace doit favoriser.
Lorsqu’à Strasbourg nous avons lancé le « Concert des deux rives » mon bonheur a été immense de voir année après année entre 10.000 et 15.000 spectateurs assis sur l’herbe du Jardin des deux Rives et plébisciter notre orchestre philharmonique : culture pour les plus grands nombre possible !
De même nous avons installé le Philharmonique dans le quartier de la Meinau et emmené les enfants et parents de la Montagne Vert à l’Opéra….
Lire des romans, lire la Princesse de Clèves… lire son journal tout simplement, fait partie des actes que des élus doivent contribuer à promouvoir.
Et c’est ainsi que la culture sous tend toutes les autres politiques.
Pour tenter de faire comprendre la démarche aux élitaires jaloux de leurs repaires de happy fews, rappelons que les petits pas sont toujours au commencement des grandes ascensions et qui peut dire que le rap ne conduira jamais vers les Polonaises de Chopin, la Pastorale de Beethoven ou La symphonie du nouveau monde de Dvorak. La Joconde est faite pour être regardée sur leurs écrans par les jeunes des quartiers de Mulhouse ou Strasbourg, aussi bien qu’au Louvre par les chanceux qui peuvent s’y rendre.

Cette profession de foi établie on est en droit de constater que la culture ne prend guère de place dans les programmes de nos candidats. C’est pourquoi je me félicite de les avoir tous interpelé. Je suis très reconnaissant à Yann Wehrling, Jacques Cordonnier, Philippe Richert et Jacques Bigot d’avoir bien voulu développer et démonter ainsi que la culture n’était pas la grande oubliée – du moins pour eux – de cet importante échéance pour notre région.

J’ai été séduit par les arguments de Yann Wehrling dont je partage l’ensemble de l’analyse et dont je recommande la relecture. Oui, il faut parler de notre dialecte, le préserver et le développer. Mais artiste lui même et qui sait parler de son art, comment ne pas adhérer à la vision culturelle de Yann ? Oui, la culture rassemble et fédère ceux qui y croient et militent pour elle.
Jacques Cordonnier s’exprime avec ses convictions et qu’il développe son point de vue fait dire a beaucoup des siens : un événement considérable vient de se produire, la droite pour la première fois parle de culture. Comme s’ils étaient eux même convaincus que la culture est totalement embastillée par la gauche. Alors que je ne cesse de proclamer cette évidence : « la culture est fille de la liberté » Jacques Cordonnier exprime une conception élitaire de la culture sur laquelle je donne mon point de vue dans mon analyse finale. Pour moi il ne saurait y avoir de barricade séparant les « cultivés », les « sachants » des incultes et pourquoi pas à la limite des sous hommes ? Ceux qui n’ont pas eu la chance d’être touchés par la culture doivent constituer pour des élus de la République un territoire de mission.
J’invite à lire et à relire la profession de foi culturelle de Philippe Richert. Je fais miennes toutes ses analyses et je ne puis que rendre très attentif tous les acteurs de la vie culturelle à une de ses propositions innovantes et bienvenues : « A cela, je réponds que la création artistique doit être une liberté qui n’est pas soumise à l’appréciation du politique, les pouvoirs publics doivent uniquement offrir des conditions de création. Et en ce sens, je souhaite que la collectivité régionale puisse soutenir la création artistique et, entre autres actions, nous encourageons très directement des résidences d’artistes et pourquoi pas l’aide à l’installation de jeunes artistes comme cela peut se faire pour les artisans ou les PME. Un fonds sera constitué pour ce type d’actions et les modalités d’utilisation en seront définies par des personnalités aux compétences effectives. »
Voilà en effet une proposition qui ne peut qu’être totalement bienvenue et qui rendrait l’action de la région encore plus exemplaire.

Enfin et il me faut le dire avec honnêteté je ne trouve pas le moindre point de divergence entre les propositions de Jacques Bigot et ma vison de la culture en région. Que les esprits chagrins ne simplifient pas et n’en déduisent pas que je suis passé au parti socialiste. Je suis et je reste gaulliste, peut-être plus libre que jamais à partir de ces élections régionales….
Certains pourraient voir dans les propositions de Jacques Bigot un catalogue. Sans doute, mais il répond à des réelles attentes tout comme Philippe Richert et leurs catalogues sont fournis de manière très pertinente
Peut-être pourrais je former le vœu que la vison de Jacques Bigot soit à tout jamais dépourvue d’esprit partisan et de clientélisme (c’est ce que certains reprochent aux socialistes que de vouloir capter la culture et d’en faire « leur » affaire exclusive) Il est contraint de s’allier à EE dont je regrette vivement qu’ils n’aient pas souhaité répondre à ma lettre ouverte.
Mépris ? Sectarisme ? Manque d’idées ?
A chacun d’avoir son opinion sur cette absence dans un débat culturel qui est aux antipodes de l’esprit politicien, qui est passionnant et enrichissant par son ouverture…

Robert GROSSMANN

http://www.robert-grossmann.com

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